Comment les radionucléides migrent-ils dans l’argile ?
Depuis plus de quarante ans, nous étudions les interactions entre les substances radioactives et l’Argile de Boom, une argile faiblement indurée, dans le cadre d’un stockage en profondeur des déchets radioactifs de haute activité et/ou de longue durée de vie. Des études et des expériences sont menées à la fois en laboratoire de surface, sur des carottes d’argile issues de forages, et dans le laboratoire souterrain HADES construit à Mol, à 225 mètres sous terre.
Nous focalisons la recherche actuelle notamment sur les mécanismes de transport de ces radionucléides dans l’argile. L’étude de ces mécanismes permet d’évaluer l'évolution du stockage et du milieu géologique dans lequel il est implanté. Elle permet aussi une analyse robuste de sa sûreté à long terme.
Quels mécanismes de transport des radionucléides étudions-nous ?
Nos recherches actuelles portent sur les mécanismes de migration des radionucléides dans l'argile.
L’Argile de Boom se révèle être une roche très peu perméable et possédant une forte capacité de rétention (piégeage) de nombreux radionucléides et contaminants chimiques en raison de ses caractéristiques minéralogiques et chimiques. Elle présente donc une bonne aptitude à retarder leur migration dans l’environnement. Notre programme de Recherche, Développement et Démonstration (RD&D) se focalise sur trois mécanismes de migration des radionucléides au sein de l’Argile de Boom : le transport dans l’eau interstitielle, les spéciations-solubilités et la sorption.
Le transport dans l’eau
Les argiles sont en quelque sorte des millefeuilles : elles sont constituées de très fins feuillets entre lesquels se trouvent des éléments chimiques, qui assurent la cohérence entre ces feuillets, et de l’eau. C’est ce que nous appelons l’eau interstitielle. Lorsque les barrières ouvragées se seront dégradées et que l’argile prendra le relais, les radionucléides entreront en contact avec cette eau interstitielle et s’y diffuseront. Comme cette eau interstitielle ne bouge presque pas, le transport des radionucléides dans l’argile sera excessivement lent.
Nous étudions ce transport grâce à des expériences menées tant à petite échelle, en laboratoire, qu’à grande échelle dans le laboratoire souterrain HADES. Elles consistent à injecter des traceurs radioactifs dans l’argile et à suivre leur très lente migration.
Les spéciations-solubilités
Nos études de «spéciation-solubilité » visent à identifier l’espèce chimique dominante du radionucléide ( «spéciation ») dans cette eau interstitielle. Observerons-nous un précipité, des suspensions colloïdales ou uniquement l’élément dissout ? Et quelles concentrations seront en jeu ? Ces informations sont essentielles car d’une part, les espèces chimiques du radionucléide conditionnent les modalités de sa migration dans l’argile. D’autre part, plus la concentration d’un radionucléide dans l’eau est élevée, plus son relâchement au cours du temps du système de stockage est élevé.
Grâce à ces études, nous obtenons un inventaire des différentes espèces chimiques des radionucléides qui se retrouveront dans l’eau interstitielle de l’argile et nous pouvons évaluer les principaux mécanismes de transport de ces radionucléides.
La sorption
Les couches d’argile présentent des surfaces chargées électriquement sur lesquelles la plupart des radionucléides vont venir se fixer. Il s’agit des mécanismes de sorption des radionucléides que nous étudions également. La sorption des radionucléides permet leur décroissance radioactive dans la roche hôte et limite ainsi leur impact radiologique lors de leur lente migration.
L’eau interstitielle des argiles peu indurées, l’Argile de Boom en particulier, peut contenir une quantité importante de molécules organiques (résidus de plantes et d’animaux lors de la sédimentation de l’argile en milieu marin). Certains radionucléides présentent une très forte affinité pour ces molécules, ce qui réduit leur sorption chimique dans l’argile et favorise leur relâchement. Nous étudions donc aussi les interactions entre ces molécules organiques et les radionucléides afin d’affiner nos connaissances sur les mécanismes de sorption.
Comment garantissons-nous la sûreté d'une installation de stockage en profondeur ou géologique ?
Comme la couche géologique reste stable pendant au moins plusieurs centaines de milliers d'années, elle se révèle idéale pour isoler l’installation renfermant les déchets radioactifs des changements qui surviennent à la surface. L'installation elle-même ainsi que l'emballage des déchets jouent également un rôle important en matière de sûreté, car ils permettent de confiner les substances radioactives pendant une longue période.
Dans quel sous-sol peut-on réaliser un stockage en profondeur ou géologique ?
Au niveau international, trois catégories de roches hôtes sont envisageables dans le cadre du stockage en profondeur. Dans notre pays, les roches argileuses, avec leurs propriétés avantageuses, semblent être les plus adaptées pour y stocker en profondeur des déchets radioactifs. La nature regorge en effet d’exemples d’objets restés intacts dans une couche d’argile durant des centaines de milliers d’années.
HADES : un laboratoire de recherche souterrain reconnu à l’international
HADES est un laboratoire souterrain de recherche situé à Mol, à 225 mètres de profondeur dans l’Argile de Boom. Il nous permet de mener la partie «in situ » de notre programme RD&D (recherche, développement et démonstration) en vue du stockage en profondeur ou géologique des déchets de haute activité et/ou de longue durée de vie.
En savoir plusDernière modification le 22/04/2025